Une médecine de salon

Il est sans doute de moins en moins acceptable pour le commun des mortels de concevoir que l’homme ait un jour marché sur la lune, mais pas encore su résoudre l’énigme de son équation finale. Devenues préoccupations collectives, comme pour contrer notre issue fatale, maladies et guérisons sont désormais au centre des préoccupations cathodiques. Longtemps cantonnée aux émissions spécialisées, la thématique de la santé a, lentement mais surement, irradié les émissions de société, puis toute la grille de programmation, jusqu’aux émissions politiques. Plus globalement, la façon dont les médias parlent de la santé reflète la perte de prestige de la médecine et la prégnance de la notion de « risques » à tous les étages.

Une politique de comptoir

Combien d’épidémiologistes, virologues, infectiologues voyons-nous défiler dans les médias depuis le début de la crise sanitaire ? Auréolés de leurs titres, il en vient d’innombrables et de toutes les spécialités sous prétexte de « rendre audible » par le grand public un discours médical « pointu ». Lisez : « que tout le monde n’entend pas avaler sans pilule ». Cette position d’ « éclaireur » donne bien souvent à ces experts l’occasion d’anticiper dans les médias la parole politique qui va suivre, voire de l’inspirer. Pire, sous couvert de compétences scientifiques, ils sont invités à donner leur avis sur tout, mesures économiques à prendre et sanctions juridiques éventuelles. A la fois juges et parties, commentateurs et conseilleurs, ils prennent de vitesse la communication officielle. En vertu de quelle légitimité, hors champ médical ? 

Le contradictoire, ciment démocratique

Les « autres » scientifiques qui veulent contredire ces positions ne sont, quant à eux, jamais invités à la table des experts « entendus ». Or, à ceux qui sourcillent quelque peu, il faut bien le justifier. Et voilà que la boucle est bouclée. Dans le langage nouveau, sur fond de consensus médiatique, la prise de parole ou pensée critique vaut l’accusation d’être complotiste. Comment mener un débat politique serein et ouvert en ces termes ? C’est oublier, en outre, que l’entière liberté d’analyse d’un scientifique fait partie intégrante des principes fondamentaux de la science. Et pour cause.

Il y a la théorie et puis il y a la pratique. Lors de la pratique, on peut avoir des théories rivales qui expliquent un même phénomène. Pourquoi ? Parce que la science produit des hypothèses. C’est de cette manière, par constats pluriels et croisés qu’elle a toujours progressé. C'est ainsi aussi que naissent les découvertes. L’orgueil élitiste lié au système actuel et favorisant une minorité de voix scientifiques refusant toute dissonance est un frein au progrès. 

Cet ultra-conformisme de la pensée « unique » est un des maux dont souffre d’ailleurs la démocratie libérale actuelle, dans bien d’autres domaines que la science, ce pourquoi les voix extrêmes gagnent du terrain. De là aux réactions populistes, il n’y a qu’un pas. Le signal régressif est désastreux et pourtant, ces « Vus à la télé » s’en étonnent.