Vous cherchez une petite citadine européenne électrifiée ? Dans ce cas, tablez sur un budget d’environ 35.000 euros ! Il n’y a pas si longtemps, ce budget vous permettait d’acquérir une berline allemande joliment statutaire. Aujourd’hui, vous roulerez dans une pile à roulettes, tout juste capable d’embarquer deux petites têtes blondes et une poussette. Alors oui, il y a moins cher, mais c’est… chinois ! Outre cette invraisemblable incohérence écologique à une époque où les mots « circuit court » et « environnement » sont sur les lèvres de tous nos politiques, voilà qui souligne à quel point l’Europe a baissé son froc devant l’Empire du Milieu ! 

Un commerce équitable ?

Côté frais de douane, c’est le grand déséquilibre : 10% pour les constructeurs de l’Empire du Milieu voulant exporter leur camelote chez nous, et entre 15 et 25 % dans l’autre sens. Vous parlez de commerce juste et équitable ? Vaste blague… Alors, forcément, comment voulez-vous lutter avec un pays qui n’impose aucune de nos lois sociales à ses sociétés et où le coût de la main d’œuvre n’est qu’une fraction du nôtre ? Bref, c’est l’invasion, pure et simple. Avec parfois de véritables chevaux de Troye, à l’instar de ces MG qui ne retiennent de leurs joyeux ancêtres que le badge. Tout le reste, c’est du plastoc, du métal et une grosse pile « made in China » !

Soit piéton, soit chinois à crédit

En revanche, pour le consommateur condamné, le choix est assez clair : c’est soit piéton, soit chinois à crédit. La petite citadine populaire abordable, on oublie. Le segment n’est plus assez rentable pour la plupart des constructeurs qui ont donc décidé de le délaisser. Nous ferons bientôt nos adieux aux Ford Fiesta, Peugeot 108 et autres Renault Twingo ! Electrifier ces modèles les rendrait lourds et beaucoup trop chers. Les conséquences de tout ceci sont assez évidentes : des voitures neuves inabordables pour une bonne partie d’entre nous, un marché de l’occasion qui va exploser et donc, une mobilité qui restera hors de prix pour une sacrée tranche de la population. Et ce n’est pas l’annonce de la SNCB d’augmenter les tarifs de 9% qui va solutionner le schmilblick. 

Dans une interview accordée à 20 Minutes, Carlos Tavares, le patron de Stellantis, se posait la question suivante: « Voulons-nous vraiment rendre la mobilité accessible à la classe moyenne, aux familles ? Ou pas ? Voulons-nous mettre la liberté de mobilité entre les mains des constructeurs chinois qui vendent des véhicules électriques à des prix très bas ? Les politiques doivent se positionner clairement par rapport à ces questions fondamentales ! »

Bref, inutile d’avoir fait Solvay pour comprendre que ceux qui auront la possibilité de s’acheter un véhicule neuf, s’orienteront en masse vers des voitures chinoises. A prix égal, celles-ci sont tout simplement plus performantes, mieux équipées et plus spacieuses que leurs concurrentes européennes. Et quand les Etats-Unis et la Chine stimulent leurs entreprises, l’Europe stigmatise son industrie automobile et lui fait la sourde oreille depuis le dieselgate.

Un cocktail explosif

Dans une lettre ouverte, destinée aux décideurs de l’UE, Luca De Meo, directeur général de Renault et président de l’ACEA (Association Européenne des Constructeurs Automobiles), pointait du doigt le danger qui se profile : « le soutien des autorités nationales et locales a été massif [pour la transition verte, ndlr] et continue d'augmenter en Chine et aux États-Unis. […] l'approche de l'Europe est de réglementer l'industrie – souvent de façon non synchronisée. »

Des matériaux toujours plus chers (qui plus est provenant majoritairement de… Chine), des budgets en recherche et développement qui explosent du fait de l’échéance brutale qui est imposée et d’une absence totale de soutien de l’Europe : le cocktail est explosif. Pour la population, il n’y a tout simplement aucune alternative. Pour l’industrie automobile européenne, la survie s’apparente à un mauvais épisode de Koh-Lanta. Pauvre Europe…

NDLR : Selon les données de l’ACEA 2022, sur 301 usines en Europe (comprises « géographiquement »), pas moins de 194 font partie de l’Union européenne composée de 27 nations. En allant plus en détail, 134 des usines totales sont dédiées à la production de voitures, 41 aux véhicules utilitaires légers, 52 aux véhicules lourds, 66 aux bus, 72 aux moteurs. Seuls 18 traitent des batteries électriques.