Ainsi dans son rapport « les inégalités des émissions en 2030 » publié en novembre 2021, OXFAM explique que « la crise climatique et les inégalités sont deux phénomènes extrêmement liés » avançant que « les 10% les plus riches sont responsables de 50% des émissions mondiales » tandis que « les 1% les plus riches émettent davantage que la moitié la plus pauvre ». Le budget carbone permettant de limiter le réchauffement à 1,5° aurait ainsi « été dilapidé dans le seul but d’accroitre la consommation des 10% les plus riches »

Quand on regarde de près les chiffres d’OXFAM on retrouve effectivement que le top 10 est responsable de 47,6% des émissions (empreinte carbone annuelle de 31 tC02), le top 1 de 16,8% des émissions (empreinte carbone annuelle de 110 tC02). Quand on entre dans le cercle très fermé des multimillionnaires voire des milliardaires les chiffres donnent le tournis : 467 tonnes pour le top  0,1 et 2351 tonnes pour le top 0,01. 

Copyright : Emissions mondiales et inégalités de revenus (World Inequality Lab)

Mis en regard des revenus, ces chiffres apparaissent ubuesques. Comment un cadre moyen français (revenu>37 000 €/an) peut-il émettre 31 tCO2/an quand on sait que la moyenne hexagonale est de 6 tCO2 d’émissions directes et de 9 tCO2 si l’on corrige des émissions d’import-export. Et que dire d’un cadre sup (R>125000 euros) supposé émettre 110 tC02/an.

La « moulinette » mise en ligne par l’ADEME permet à chacun d’estimer ses émissions annuelles. En l’appliquant à un cadre supérieur fictif gagnant annuellement 150 000 € (soit 12 500 €/mois) possédant deux voitures dont un gros SUV, un pavillon de 250 mètres carré, effectuant 5 vols intérieurs et trois vols longue distance, prenant régulièrement le train mais consommateur raisonnable quant à son habillement et son alimentation, on obtient 13 tCO2/an. En forçant la mise on n’arrive pas à dépasser les 20 tCO2 soit 5,5 fois moins que les 110 tCO2 annoncé par OXFAM pour le top 1. Par ailleurs, si l’on rétro-calcule les émissions françaises à partir de la distribution des revenus (10% se situent dans le bottom 50, 50% dans le middle 40 et 40% dans le top 10), on obtient le chiffre délirant de 1062 MtCO2 soit plus de 2,5 fois les 408 MtCO2 territoriales émises en 2022 par les 67 millions de français.

Une méthodologie qui gonfle les émissions

Pour expliquer cette différence il est indispensable de décortiquer la méthodologie utilisée par OXFAM associé au World Inequality Lab. On y découvre avec stupéfaction qu’aux « émissions de consommation » sont ajoutées des « émissions financières » liées à la détention d’actifs. En d’autres termes, si vous détenez des actions de TotalEnergies, de Saint-Gobain ou autre Lafarge les émissions liées à la fabrication et la ventes de leurs produits vous sont attribuées. Ainsi quand un citoyen Gabonnais fait le plein d’essence ou achète un sac de ciment à Libreville c’est à l’actionnaire d’assumer les émissions associées. De même en suivant cette logique, les émissions d’un logement sont de facto attribuées au propriétaire et non au locataire.

Faire corréler les chiffres à la seule richesse

En d’autres termes, pour OXFAM, les émissions françaises se décomposent en 408 MtCO2 d’émissions territoriales et 654 MtCO2 d’émissions financières déduites des émissions de consommation des plus pauvres. Le rapport de la World Inequality Lab confirme que plus de « 70% des émissions des plus riches sont des émissions d’actifs ». En procédant de la sorte il n’est évidemment pas surprenant que les émissions se corrèlent parfaitement à la seule richesse et gomme notamment tout impact démographique. Quand on déroule un peu plus la « pelote de laine », on découvre que le World Inequality Lab est, entre autres, coordonné par Thomas Piketty et que Lucas Chancel l’auteur du rapport est l’un de ses anciens thésards. CQFD

Un fausse vérité

Bien qu’escroquerie grossière cherchant à démontrer sans vergogne que les riches sont les grands responsables du réchauffement climatique, il faut reconnaître à OXFAM un coup de maître.

Tournant en boucle sur les réseaux sociaux, les chiffres de l’ONG sont maintenant repris dans le dernier rapport du GIEC destiné aux décideurs « The 10% of households with the highest per capita emissions contribute 34–45% of global GHG emissions while the bottom 50% contribute 13–15%. (high confidence) » mais aussi dans un article récent de l’AIE « The world’s top 1% of emitters produce over 1000 times more CO2 than the bottom 1% ». Si critiquer OXFAM reste permis, contester les rapports du GIEC ou de l’AIE est devenu blasphème. 

Chapeau OXFAM pour votre remarquable fake new : voilà comment un mensonge répété mille fois se transforme finalement en vérité … 

Philippe Charlez

Expert en Questions Energétiques
Institut Sapiens