La comédienne britannique Francesca Amewudah-Rivers interprétera l’amante maudite au Duke of York’ Theatre de Londres du 23 mai au 3 août, dans la nouvelle adaptation, signée Jamie Lloyd. Même si ce ne sera pas la première fois que cela arrivera sur les planches londoniennes, d’aucuns ont pu s’étonner de cette nouvelle. Sur X/ex Twitter, les internautes se questionnent - parfois vertement - sur la légitimité de l’actrice : « Le monde n’est pas raciste, mais c’est le pire casting pour Juliette », « Pourquoi le personnage est blanc ? », « C’est quoi ce lissage de l’histoire ? »

La communauté woke étant toujours prompte à la détente, vent debout, près de 900 acteurs, principalement des femmes noires et des acteurs non binaires, ont signé une lettre ouverte publiée dans The Guardian en soutien à la jeune femme. « Comment l’annonce d’une pièce peut-elle provoquer autant d’abus tordus et laids (…) Toute langue qui s’élève contre vous tombera » promettent-ils, à l’adresse des « victimes de racisme ». Et de préciser : « les racistes font encore beaucoup de bruit pour rien ». Cette lettre intervient après le communiqué publié sur les réseaux sociaux par la compagnie théâtrale de Jamie Lloyd le 5 avril dernier, qui dénonçait les propos racistes et haineux dont était victime Francesca Amewudah-Rivers

L’œuvre et son époque

Dans « Othello ou le Maure de Venise », la tragédie également écrite par William Shakespeare, le personnage principal est noir et la tradition scénique anglaise depuis la création de la première pièce le présente comme tel. Le terme est précis, « more » signifie « nègre » pour l’Anglais de l’époque. Ce n’est pas une insulte de la part de l’auteur, comme d’écrire que les femmes Africaines « ont des mamelles longues » et non « petites » comme les femmes blanches. Et quand William Shakespeare parle de « nègre » pour décrire Othello, de sa propre explication, il vise à revêtir son héros de toutes les caractéristiques morales des Nègres telles qu'elles étaient connues des Anglais de son temps. Mais, on est en 1603. Et la cancel culture n’a pas encore été inventé.

Toujours est-il que si les wokistes tolèrent un Othello noir, malgré sa « négritude » tel que dépeinte par l’auteur, Shakespeare a voulu sa Juliette blanche et en ce sens, son œuvre mérite le respect.

Rappelons aussi que le film français « L’Autre Dumas », sorti en 2010, voyait l’écrivain métis joué par un Gérard Depardieu non grimé, ce qui avait aussi provoqué une vive polémique dans l’autre sens cette fois. Question : comment ceux qui contestent un Alexandre Dumas blanc pourraient-ils revendiquer une Juliette noire sans faire preuve d’une flagrante incohérence ?