Le 7 mars 2023, le chancelier Olaf Scholz a annoncé que l’Allemagne installerait 17 à 21 GW de nouvelles centrales électriques au gaz. Cela représente environ 10 % de la capacité totale de production d’électricité installée et presque autant que les centrales à gaz existantes. Ces nouvelles centrales sont essentielles pour soutenir la production variable et intermittente d’énergie renouvelable. Même en Allemagne, il fait nuit et le vent ne souffle pas tout le temps. Ainsi, les éoliennes ne produisent leur capacité installée que 21 % du temps et les panneaux solaires seulement 11 %. M. Scholz a déclaré qu’il s’agissait d’installations « d’appoint », alors que c’est le contraire qui est vrai, puisqu’elles devraient produire plus de 80 % du temps. Mais ce n’est pas la seule chose qui n’est pas claire en matière de politique énergétique…

Il s’agit d’une contradiction totale avec la déclaration de l’Allemagne sur le climat. Pour ne pas avoir l’air complètement ridicule et maintenir l’objectif de décarbonisation devant une population médusée, il a assuré que ces nouvelles centrales seraient conçues pour fonctionner à l’hydrogène. Vert, bien sûr. Mais il n’y a pas assez de vent et de soleil en Allemagne pour produire de l’électricité verte, et encore moins de l’hydrogène vert. L’hydrogène viendra donc d’ailleurs ; l’Allemagne se tourne vers l’Afrique, où la moitié de la population n’est même pas connectée au très faible réseau électrique. Tinne Van der Straeten aussi, puisqu’elle pense importer cette précieuse molécule depuis la Namibie, pour ensuite la brûler comme une banale molécule de gaz.

La réalité revient toujours, et le secret d’État de l’EnergieWende continuera de s’effilocher jusqu’au jour où un politicien courageux osera déclarer publiquement : « Nous nous sommes lourdement trompés ».

Mais il est trop tôt et nous entendrons parler de l’hydrogène pendant longtemps encore. Il est d’ailleurs tellement à la mode que ce sont les femmes qui se mobilisent pour l’imposer. Le 8 mars, nous avons eu la journée de la femme, mais maintenant nous allons passer aux choses sérieuses. Une conférence « women in green hydrogen » aura lieu à Amsterdam les 28 et 29 mars car « les voix des femmes et de la diversité au sein de l’industrie de l’hydrogène doivent être mises en avant ». Grâce à une politique de genre judicieuse, les lois de la chimie seront inversées. Produire une molécule d’hydrogène à partir d’électricité verte nécessite sept fois plus d’énergie que de la produire à partir de gaz naturel (voir mon livre L’utopie hydrogène), mais grâce à la théorie du genre, cette loi de la thermodynamique sera inversée.

Il semblerait qu’ExxonMobil commence à prendre conscience de l’ampleur du désastre qui l’attend si elle ne revient pas rapidement au réalisme. Après avoir dépensé quelque 350 millions de dollars pour développer des biocarburants à base d’algues, dont 60 millions rien que pour la publicité, ils viennent de jeter l’éponge et le rêve s’est évanoui, les technologies à base d’algues n’étant qu’une énième mauvaise idée en matière de politique énergétique. Darren Woods, PDG du géant pétrolier Exxon Mobil Corp, vient d’attaquer la politique énergétique européenne, alors qu’il y a encore peu de temps, l’entreprise commençait ses discours européens en affirmant son allégeance à la politique verte de l’UE. Le message est clair : le géant pétrolier réévalue sa stratégie européenne à la lumière des mesures « punitives » prises par l’UE pour réduire la production de pétrole et de gaz. L’engagement résolu d’ExxonMobil en faveur du pétrole et du gaz a toujours suscité des critiques de la part des écologistes, mais le marché boursier semble approuver sa stratégie, la valeur de son action ayant augmenté de 134 % depuis la pandémie Covid. 

L’avenir énergétique est celui qui était défini avant que l’Allemagne n’impose à l’UE son impossible transition énergétique. Heureusement, comme le démontrera Steven Koonin dans sa conférence au B19/Club de Pan lundi prochain, il n’y a pas lieu de paniquer. Demain ça ira mieux. Non pas grâce à la théorie du genre, mais grâce aux ingénieurs, hommes et femmes.