A la mi-mai, Marie Toussaint, la tête de liste du parti Europe Ecologie les Verts (EELV) a dévoilé son socle programmatique. Long de 170 pages, on vous en résume l’essentiel : un Etat providence écologique européen, du dogmatisme et beaucoup de termes creux pour « lutter contre l’union des droites, soutenue par les lobbies, qui se fait sur le dos de l’écologie et nourrit un pacte brun, avant que la digue ne lâche » (sic !). On respire et on souffle un bon coup entre la juxtaposition de chaque mot !
Novlangue et champs lexical flou
La nouvelle feuille de route : promouvoir la « pauvrophobie » d’Etat au rang de « discrimination socio-économique ». Mais, le concept ne percole pas ! A dérouler son compte X/ex Twitter, de nombreux sympathisants reprochent à @marietouss, juriste de formation tout de même, la pauvreté intellectuelle de son vocabulaire : « pourquoi parler de pauvrophobie et ne pas utiliser la notion de lutte des classes, celle-là même qui a depuis toujours structuré la gauche » ?
Parce que l’exercice de style présente une vertu précieuse pour qui l’emploie :
lutter contre la « pauvrophobie » détourne les regards du vrai problème : la pauvreté à laquelle les éco-socialistes, depuis leur genèse, n’apportent aucune autre réponse concrète que celle de l’assistanat.
Totalitarisme et braconnage
Le mantra d’EELV qui alimente le dogme : « refuser le retour à l’austérité » (si, si !), « lutter contre le populisme » et « rendre le pouvoir au peuple ». Yes, nous voilà sauvés ! A l’évidence, Marie Toussaint braconne ouvertement sur les terres de l’extrême gauche, ce qui ne manque pas d’agacer d’ailleurs La France Insoumise (LFI). Concrètement, comment défendre le vivant ? Taxer toujours plus et alimenter l’idéologie de l’interdiction - une vieille habitude des verts - sont les maîtres-mots. Si ce n’est pas de l’austérité ! Et puis, dans la plus pure tradition écologiste, pour rendre le menu plus digeste, de nouveaux droits de l’homme des plus farfelus sont soupoudrés au gré des lubies, comme « le droit à un jardin potager près de chez soi » érigé au rang de priorité. Puisqu’on vous le dit !
Un conseil : épargnez-vous la lecture de cette nommée « bifurcation écologique et sociale ». A lire ces propositions lubrifiées au poil à (se)gratter, aucune vertu n’est accordée au capitalisme. Il n’y a donc aucune chance de créer une quelconque croissance et les pauvres risquent de se multiplier comme des petits pains.
Et l’électeur n’est pas dupe. À deux semaines des élections européennes du 9 juin, selon un sondage Toluna-Harris Interactive, EELV plafonne à 5% des intentions de vote , soit le score minimum pour espérer être représenté dans l’hémicycle du parlement européen à l’issue du scrutin. Selon un autre sondage Ipsos pour Euronews, les Verts devraient perdre plus d’une vingtaine d’eurodéputés, principalement en France et en Allemagne.
Chronique d’une mort annoncée
Les effets de l’écologie punitive se font ressentir partout en Europe. Le désintérêt pour les partis politiques environnementaux est généralisé. La campagne des Verts passe sous les radars médiatiques et c’est aussi la débâcle en Belgique. En cause, « un défaut d’incarnation et un électorat particulièrement volatil et poreux aux idées des autres partis, surtout en période de crises plurielles et d’inflation », analyse Benjamin Morel, politologue et maître de conférences en droit public à l’université Paris Panthéon-Assas. Exit le Green Deal et les marches pour le climat de 2019 pour une sortie de crise espérée.
Et pourtant Jean-Marc Nollet, co-président d’Ecolo, persiste et signe dans la foulée des derniers sondages : « personne n’a jamais autant réalisé en 5 ans qu’Ecolo pour le climat, la nature, le vivant. Affirmons-le haut et fort : on ne fait pas et on ne fera jamais d’écologie sans les écologistes. On ne fait pas et on ne fera jamais d’écologie sans Ecolo aux manettes ». Il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir.
Et c’est là que l’on se permet la reprise d’une citation attribuée à Jean-Marie Gourio, ancien rédacteur en chef du magazine Hara-Kiri - devenu par la suite Charlie-Hebdo - et grand prix de l’humour noir. Face à cette débandade, « c’est le calcaire des larmes qui rend myope ! ». Quand la montagne dogmatique accouche d’une souris verte, le furet court et pédale dur.
Pour mémo, les élections fédérales du 18 mai 2003 virent le score d’Ecolo chuter sous la barre des 10%, avec seulement quatre députés fédéraux décrochés à la sortie des urnes. Cette déconfiture fût confirmée lors des élections régionales et européennes du 13 juin 2004, lors desquelles les Verts n’obtinrent que trois députés à la région wallonne et un seul député européen (Pierre Jonckheer) contre trois en 1999. « Aah zut, il y avait aussi Ecolo ! Je leur donnerai ma préférence au prochain sondage », taclait déjà humoristiquement PAN dans ses pages. Vingt ans plus tard, le même scénario se dessine. Décidément, malgré leur lutte d’influence et leurs mobilisations, quitte à se faire Hara-Kiri au gré des revendications citoyennes, il y a des « factions politiques » qui sont éternellement vouées à passer leur tour. Cela étant dit, on ne s’en plaindra pas.