Si la tendance se poursuit, et personne ne voit franchement pourquoi elle s’inverserait dans ce pays, l’homo politicus belge est en train de  devenir, à pas cadencé, la créature la plus unanimement critiquée du pays. Dans ce contexte, il ne faudra pas s’étonner de la réapparition de la guillotine pour couper court à ses errements. En attendant, il suffit de tendre l’oreille pour se rendre compte que, lorsque tout le monde se ligue contre vous, le problème, c’est... sans doute vous.

Ainsi de l’ARAU (Atelier de Recherche et d’Action Urbaines), au cœur de la gauche urbanistique. Du GERFA (Groupe d’Étude et de Réforme de la Fonction administrative, syndicat agréé de la fonction publique). Ou encore de l’UNSP-Finances, branche fiscale de l’Union Nationale des Services Publics, autre syndicat de la même Fonction publique. Quelques organisations, dont nous ne sommes pas forcément proches des idées, mais dont il faut bien reconnaître que, de droite ou de gauche, quelle que soit notre belgitude, tendance chicon ou merguez, leurs analyses épousent le bon sens.

Bordel partout, intelligence nulle part

Qui, en effet, pourrait affirmer aujourd’hui qu’il n’est pas d’accord avec le fait que « le projet de Métro 3 se prend la réalité dans la face » (ARAU) ou que le projet « Good Living » représente un passage en force auprès des Bruxellois (ARAU toujours) ? Qui, parmi les contribuables, les notaires ou les professionnels de la comptabilité, n’a pas constaté que l’administration fiscale était désormais aux abonnés absents ? En cause : 2 applications (HYPOPRO et First) introduites à grands frais dans la structure et qui, selon l’analyse de l’UNSP, contribuent à la perte de « dizaines de milliers de jours de travail ». On en reparlera.

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Gros Kinkin prend cher (bis)

Alors, lorsque le GERFA, dans la dernière édition de son organe mensuel*, invoque la « léthargie du ministre Henry », alias Gros Kinkin, face aux oukases de la Flandre qui a décidé de fermer le ring, on ne peut qu’applaudir. D’autant que le Gerfa rappelle sans langue de bois que la passivité de Philippe Henry (Ecolo) avait déjà été mise à l’honneur lors des inondations de 2021 et de quelle lugubre façon : « Alors que 39 personnes sont décédées et que de multiples erreurs ont été commises (...), le ministre est toujours en place, préférant son maroquin à la dignité d’une démission. » Nous ne l’aurions pas mieux écrit.

Léonard, son carrefour fermé, son ministre obtus

Aujourd’hui, la problématique de la fermeture du carrefour Léonard, depuis le 16 avril vers le Ring Est (Waterloo) et à partir de juin, vers Bruxelles (jusqu’en octobre !), donne l’occasion au ministre Henry de démontrer ce qu’il sait faire le mieux : rien.

Sa réponse à cet état de fait initié par la Flandre laisse d’ailleurs pantois. Toujours selon le GERFA, il aurait ainsi déclaré : « je rappelle quand même qu’il y a d’autres formules (de transport). Je sais que ce n’est pas la panacée mais c’est une vraie offre alternative et c’est peut-être pour certains l’occasion de la tester. »
La trottinette, mon bon Monsieur, qu’on se le dise ! Foi d’écolo dogmatique. La seule bonne nouvelle pour les navetteurs et les riverains, c’est que ce ne sont pas les socialistes wallons qui gèrent le planning...

De son côté, le GERFA pointe le fait que le ministre n’a pas bougé une oreille à l’arrière de sa Tesla pour exiger une concertation, pourtant rendue obligatoire à la fois par l’interdiction de fermer les accès au Ring de Bruxelles (loi du 8 août 1980) avant concertation (loi spéciale du 19 juillet 2012). L’administration est bien renseignée.

Politiques franco(n)phones

Manque de bol, on pouffe, la seule manière d’initier cette concertation est de le faire via une « Communauté métropolitaine » qui aurait dû, le GERFA le rappelle, voir le jour en contrepartie de la sécession de BHV (Bruxelles-Halle-Vilvoorde).

Douze années plus tard, force est de constater que le nouveau bidule est resté dans les cartons face à des négociateurs francophones que l’on pourrait qualifier de... gros naïfs. « Quand bien même », insiste le GERFA, « la concertation n’en est pas moins obligatoire en dehors de la Communauté métropolitaine » si jamais celle-ci n’était pas opérationnelle... Toujours mieux d’avoir des fonctionnaires instruits que des politiques évanescents, non ?

Kleenex d’une nuit d’été

Que la Flandre nous la joue à l’envers lorsqu’il s’agit de ses intérêts est une chose. Que le dogmatisme politique, en l’occurrence celui d’Ecolo, conduise la Wallonie et Bruxelles à regarder ailleurs et ne pas organiser cette crise, une parmi d’autres, au mieux des intérêts de ses habitants et de ses contributeurs économiques
(y compris les habitants du Nord du pays), en est une autre.

Il faudra sans doute rappeler un jour à ces compotées d’incapables sans colonne vertébrale que, en plus de la fidélité au Roi, ils sont également tenus de défendre l’intérêt général. Ce qui nous éviterait le spectacle trop fréquent de voir nos chers élus se rouler dans la fange conceptuelle de leurs rêves humides.

Foster Laffont

*Diagnostic n° 417, avril 2024 - GERFA