D’aucuns reviennent avec un vieux slogan, que l’on croyait périmé, dans la Belgique fédérale. Ils insistent pour que tous les enfants, dans tout le pays, soient tenus d’apprendre la deuxième langue nationale.
Jusqu’ici, cette règle ne s’applique qu’à Bruxelles, où les enfants francophones doivent apprendre le néerlandais à partir de la troisième primaire, tandis que les enfants flamands y apprennent, dès la même époque, le français.
Chacun sait que le résultat de cette mesure est lamentable, puisque presqu’aucun jeune, à 18 ans, après avoir suivi dix années de seconde langue pendant quatre heures par semaine, n’est capable de parler cette langue.
Pendant ce temps, la plupart de nos jeunes se débrouillent très bien pour apprendre l’anglais de manière souvent efficace, et ce alors qu’à Bruxelles toujours, ils ne « bénéficient » de cet enseignement scolaire qu’à partir de l’âge de 14 ans, ce qui doit être un record mondial de tardiveté pour cette langue.
Étendre une règle inefficace à l’ensemble du pays, et ce contre la volonté des élèves et de leurs parents, ce n’est assurément pas une bonne idée.
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Elle répond à cette véritable manie des politiciens et d’une bonne partie de leurs électeurs, de vouloir ajouter tant et plus des cours à l’école, en prenant celle-ci pour une espèce d’outils de propagande. Chaque fois qu’on ajoute des heures de cours de l’une ou l’autre chose du genre « citoyenneté », pour satisfaire à des exigences plus ou moins politiques, il faut en retirer d’autres, sur des matières qui, si elles sont bien enseignées (cela arrive…), seraient réellement utiles.
Surtout, la question centrale est la suivante. Nos enfants ne sont pas les enfants de l’État. Ce n’est pas l’État qui doit décider, de manière générale, tout ce que nos enfants doivent apprendre. À partir d’un certain âge, ce sont les enfants eux-mêmes qui doivent décider de ce qui est bon pour eux, et pour l’évolution de leur vie professionnelle et personnelle. Et avant cet âge, c’est là le rôle des parents, et non de l’État, qu’il soit fédéral ou communautaire.
La question se pose pour les langues, mais aussi dans tant d’autres domaines, où l’on s’obstine à vouloir enseigner, par pure doctrine, exactement la même chose, pendant le plus longtemps possible, à des enfants qui sont différents. Si l’on ne peut respecter entièrement le slogan « à chaque enfant son école », on pourrait au moins permettre aux parents de choisir des écoles vraiment différentes. C’est là le moment où il faut parler de diversité, y compris dans la manière d’enseigner et dans l’objet de l’enseignement. On en est fort loin avec une volonté, tous réseaux confondus, d’uniformisation des enseignements et des élèves pour répondre à une norme de plus en plus collective, et, souvent collectiviste.
Quant à la question du choix de la langue, on voit bien que là où il est permis, en régions flamande et wallonne, la plupart des parents et des enfants choisissent l’anglais. Faut-il vraiment brider ainsi une majorité de personnes dans l’enseignement et l’éducation de leurs enfants ? Ils doivent en être
maîtres, et il n’y a aucune raison de penser que l’on sait mieux, au
niveau gouvernemental, ce qui est bon pour des enfants
déterminés que leurs parents eux-mêmes. Il est temps de sortir de l’étatisation rampante des programmes, qui brime les minorités, les meilleurs élèves, mais aussi les moins bons, et qui pour certains devrait s’imposer même à une… majorité.
On sait bien qu’il est parfaitement illusoire d’imposer le bilinguisme à l’ensemble du pays. Lorsqu’il y a quelques décennies, un gouvernement a prétendu que tout le monde serait bilingue à la fin de la législature, il s’est rendu ridicule puisque non seulement le taux de bilinguisme n’avait pas augmenté dans la population, mais aussi … au sein de ce gouvernement lui-même ! Le même processus se produit dans la plupart des pays bilingues ou plurilingues : la volonté d’apprendre les autres langues du pays passe pratiquement toujours après le souhait de connaître l’anglais. Un gouvernement communautaire peut bien sûr faire des efforts pour accorder davantage de rayonnement à « sa » langue, le français ou le néerlandais. Mais pas en obligeant, contre leur gré, des parents ou des enfants à faire un choix qui n’est pas le leur.
Chacun appréciera quelle langue, dans le cadre de ses projets et de sa personnalité, est la plus attrayante. Ce ne doit pas être un choix politique.
Tout comme il n’y a pas de sens, à nier les réalités régionales, comme le font quelques partis naissants ou renaissants. En revenir à une seule Belgique, fédérale, qui décide tout, c’est un retour en arrière. Prétendre le faire exclusivement pour des questions d’économie, parce qu’il « y aurait moins de ministres » est tout simplement erroné. Les derniers gouvernements de l’époque fédérale belge étaient absolument pléthoriques. De plus, ce qui coûte, ce ne sont pas les ministres, mais l’énormité du cabinet et de l’administration qu’il faut rémunérer. Même ceux qui, de manière très démagogique, veulent faire des économies, comme Ecolo, en réduisant le salaire des ministres, savent très bien que là n’est pas la mesure rentable pour le budget : il est beaucoup plus utile de réduire le nombre des membres des cabinets, mais cela, les partis n’aiment pas, parce qu’il s’agit d’une perte de postes pour leurs membres plus ou moins méritants.
Si l’on veut vraiment réduire le coût de l’État, il faut que celui-ci cesse de s’occuper de tout et qu’il engage sans cesse des fonctionnaires pour le faire. Lorsqu’on apprend que 62 % des nouveaux emplois en région bruxelloise sont de nature publique ou subsidiées, et par conséquent que les richesses doivent être créées, et partagées, par le tout petit nombre de travailleurs indépendants et salariés, on en arrive à craindre que, si l’on veut sortir du marasme économique, il faudra nécessairement bouleverser totalement un système décadent.