Une attaque au couteau dans un lycée d’Arras (FR) fait un mort et trois blessés graves ; un suspect d’origine turque interpellé pour un coup porté à l’arme blanche dans la fan zone de Stuttgart lors du match Tchéquie contre Turquie (BE) ; trois fillettes poignardées de sang-froid à Southport (UK), par un individu d’origine rwandaise ; trois personnes égorgées au festival de Solingen (DE) lors d’une attaque meurtrière au couteau revendiquée par le groupe Etat islamique (EI). Désormais, un simple couteau suffit ! L’extrémisme a définitivement mué en terrorisme low cost. Décryptage.

Plus besoin de QG ni d’ordres

Depuis les années 1970 jusqu’aux attentats perpétrés par Al-Qaïda au début des années 2000, le terrorisme se manifestait par des opérations d’envergure nécessitant des armes lourdes et des financements conséquents. Avec Daech, un autre chapitre s’est ensuite ouvert en 2005, celui des foreign terrorist fighters (FTF). Des combattants étrangers sont recrutés un peu partout en Europe, base arrière logistique, pour combattre en Syrie et en Irak. Nouvelle hybridation et nouveau variant : avec les attentats de Paris, Nice, Berlin, Bruxelles, le terrorisme prend la forme d’attentats-suicides de masse. Le but ? Affaiblir le Vieux Continent. Phénomène nouveau, à l’ère du virtuel, le djihadisme s’individualise. Inconnu des services de renseignements, n’importe quel quidam qui se sent investi d’une « mission », peut aujourd’hui se saisir d’un couteau pour rendre sa « justice divine ». Il n’a prêté allégeance à aucun groupe terroriste et aucun groupe ne l’a reconnu comme membre. 

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La propagande du wahhabo-salafisme

L’attrait croissant des jeunes, en quête d’identité et de repères, pour les contenus religieux sur les réseaux sociaux, notamment TikTok, Instagram et YouTube, est une aubaine. Les prédicateurs, improvisés influenceurs, en profitent. Le discours radical s’adapte en ligne pour correspondre à ces revendications, tant que l’individu s’accroche aux « pensées politiques », islamistes bien sûr. Bémol ! Ces imams véhiculent dans leurs vidéos multi partagées un islam de la frustration, anxiogène et binaire, réduisant la foi à un ensemble de règles et d’interdits, tout en insistant sur le respect de la charia. Pour Mohamed Fahmi, chercheur associé à l’ULB et spécialiste de la propagande audiovisuelle de l’État islamique : « Les courants salafistes ont très bien réussi à s’adapter aux nouvelles technologies et bénéficient de beaucoup d’argent venu de l’Arabie saoudite, du Koweït, de certains cercles des Émirats, du Qatar, et parfois de l’Égypte. Ces pays ont pour stratégie délibérée d’arroser les réseaux sociaux de leurs discours, en complément de ce que l’on peut lire dans les ouvrages qu’ils vendent en Europe, et de ce que l’on peut entendre sur certaines télévisions satellitaires. N’oublions pas, n’ont plus, qu’ils forment chaque année des imams européens » (*)

Un terrorisme victimaire

Le profil de ces terroristes en herbe pointe de manière inédite la société européenne, accusée d’avoir engendré ce bacille que le contexte international de l’immigration à outrance nourrit paradoxalement et stimule. Symboliquement, ce sont des figures détentrices de l’autorité qui sont visées - que ce soient des enseignants, des représentants de cultes ou des policiers. C’est clairement le rejet des institutions, écoles, églises, structures étatiques, qui nourrit le passage à l’acte. L’entrepreneur individuel d’un acte terroriste ne se voit pas comme un « monstre », mais comme une victime qui fait justice. Selon sa logique, il ne fait que tuer l’oppresseur. Il rend « service » à la communauté et la « délivre ».

Un effet exponentiel

La décentralisation est totale et la violence soudaine. L’atteinte aveugle accroît le sentiment d’interchangeabilité des cibles. L’identification potentielle ressentie par les citoyens/spectateurs provoque une panique exponentielle dans l’espace public. Les « victimes psychologiques » sont ainsi infiniment plus nombreuses que les personnes tuées ou blessées. Cette dimension constitue indiscutablement le principe d’action de ce terrorisme low cost. Sur une aire de jeux pour enfant, pendant un match de foot, sur un marché de Noël, jamais la force de frappe d’un seul individu isolé n’a été aussi puissante. En résumé, c’était lui ou elle, mais cela aurait pu être moi …

On est loin des grandes opérations d’envergure comme celles des attentats du 11 septembre 2001, qui avaient nécessité plus de 400.000 dollars de fonds à Al-Qaïda et sa nébuleuse très hiérarchisée. L’électron libre, loup solitaire, est l’héritier contemporain du criminel salafisé par une organisation extrémiste. Il joue tout à la fois sur l’irruption inattendue de la mort dans le quotidien et la déstabilisation de l’autorité dans ses valeurs démocratiques. Et il faut cesser de nier l’évidence ! Lorsque l’on fait le lien entre migration et terrorisme, les données statistiques montrent que ces terroristes qui frappent l’Europe sont en majorité extra européens, de souche ou d’origine. Face à la menace, au diable le politiquement correct ! Il est grand temps que l’Europe se réveille en faveur d’une réévaluation sévère de sa politique migratoire.

(*) « Sur TikTok, Instagram et YouTube, le salafisme a gagné la partie » - La Libre, 31 juillet 2024