Philippe Close : Innocent colosse au jardin des dettes éternelles

Il est toujours amusant d’observer comment les coalitions d’autrefois n’empêchent absolument pas les alliés d’hier de s’envoyer aujourd’hui des petites questions vachardes sur leur gestion... commune. L’ex-premier échevin Benoît Hellings (aka Triste Sire, dit aussi l’Écolo d’Oupeye) ne déroge pas à la règle en levant un lièvre à 136,5 millions d’euro. Un léporidé qu’il a pourtant largement contribué à engraisser…
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Il est toujours amusant d’observer comment les coalitions d’autrefois n’empêchent absolument pas les alliés d’hier de s’envoyer aujourd’hui des petites questions vachardes sur leur gestion… commune. L’ex-premier échevin Benoît Hellings (aka Triste Sire, dit aussi l’Écolo d’Oupeye) ne déroge pas à la règle en levant un lièvre à 136,5 millions d’euro. Un léporidé qu’il a pourtant largement contribué à engraisser…

En ce lundi 17 février, il devient urgent de mander ces Messieurs les banquiers pour éponger fissa 136 millions et quelques poussières d’argent magique. Personne ne manque à l’appel puisqu’il est gentiment suggéré à Argenta, Belfius, BNP, KBC et ING de se pencher sur les conditions que ces organismes financiers seraient prêts à concéder à la nouvelle majorité de la ville de Bruxelles. On espère que leur réaction sera plus chaleureuse qu’en Wallonie.

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Fantômes des Noël passés…

En cause, non pas l’un ou l’autre investissement extraordinaire dont le PS bruxellois aurait voulu faire bénéficier ses chers administrés mais, plus prosaïquement, le remplacement de billets de trésorerie servant à couvrir quelques budgets de 2020 et 2021. Késako et pourquoi tant d’argent si tard ?

Selon Belfius, « un  billet de trésorerie est un instrument de créance à court terme et non garanti, émis sur le marché monétaire domestique par des institutions publiques, des établissements financiers ou des entreprises. »

Faciles à émettre, ne nécessitant pas ou peu de garanties et négociés sur le court terme, ces billets de trésorerie sont considérés par le landernau politique pour ce qu’ils sont : du quasi cash. A telle enseigne que cette martingale financière, au milieu de l’épisode covid et dans le contexte des intérêts négatifs, allait faire saliver les autorités communales de l’époque (Ecolo et PS en tête) plus que de raison.

En juin 2021, Bruxelles-ville décide* d’« augmenter le programme d’émission de billets de trésorerie dématérialisés (…) d’un montant maximal de €400.000.000, utilisé pour le financement des besoins de trésorerie ainsi que pour le financement des dépenses extraordinaires de la Ville de Bruxelles vers un montant maximal de €600.000.000. » Un milliard tout de même soit l’équivalent de la totalité du budget annuel de la Ville.

Une frénésie qui, selon un rapport de la Cour des Comptes de novembre 2024, a également touché la région bruxelloise puisque celle-ci, « au 31 décembre 2023, présentait une dette flottante (999,8 millions d’euros) composée de billets de trésorerie à un an (1.081,0 millions d’euros) ».

… las, voici les Fantômes des Noël futurs !

Bien entendu, comme le dit Close sous forme de Lapalissade contenue, « on essaie d’avoir de l’argent quand on en a besoin ». Ces petits billets de trésorerie, comme les p’tits trous de Gainsbourg, varient en durée et en montants et peuvent être renouvelés à l’envi. Tant qu’il y a de la demande, y’a du plaisir !

Malheureusement, la roue du manège à billets s’est grippée sur un os à 136 millions, en lien avec les budgets extraordinaire des exercices 2020 et 2021. Quatre ans, plus tard, Hellings rappelle sévèrement que les taux sont passés de 0 % à 4 % soit une charge soudaine d’intérêts de… €15 millions. Que n’a-t-il été aussi implacable et clairvoyant sous la précédente majorité ? Nul ne sait.

Ce qu’il sait en revanche, l’ex-premier échevin, c’est que « la situation des bons de trésorerie est désastreuse » et qu’il conviendrait de rapidement se pencher sur la capacité d’emprunt de la ville portant sur les exercices 2022, 2023 et 2024. Pourquoi ? Cette cavalerie financière ne s’arrête pas aux années covid ?

Le rire du Sergent

Le bourgmestre PS, qui n’en est pas à sa dernière portion de millions vaporisés, explique que c’est bien la raison de cet appel au marché financier. Et d’ajouter sans rire que la ville « bénéficie plutôt a priori d’une baisse des taux. » Chouette alors !

Il faudra alors qu’il explique pourquoi il n’a pas profité de la quasi-nullité des taux d’intérêts de l’époque pour assurer ses financements sur le long terme plutôt que de jouer au Monopoly à court terme à coups de billets de trésorerie comme s’il se prenait pour la Banque nationale ?

S’adressant à Triste Sire et lui rappelant sa propre implication : « Nous en avions parlé quand nous étions ensemble dans la majorité. Les billets de trésorerie étaient très intéressants mais la fluctuation (actuelle) des taux, on la subit aussi, raison pour laquelle nous essayons d’avoir une gestion prudente. Espérons que l’on tourne autour de 2,5 %. On verra cela. » Vous la sentez bien, la profondeur de l’analyse ?

Réplique de Hellings (qui en profite pour rafler la palme du culot) : « Je vous encourage à fixer à long terme les financements de 2021, 2022 et 2023 et je vous encourage à une gestion plus prudente. L’argent doit être consacré aux services publics. » Si on le comprend, l’affaire des billets de trésorerie ne s’arrête pas à 136 millions.

Un observateur plus rigoureux serait tenté d’ajouter que lorsque l’on gère des milliards d’euros à coups d’instruments financiers complexes, on ne laisse pas le grisbi dans les pattes d’un juriste namurois et de sa bande d’édiles débiles mais on fait appel à des professionnels. Ce qui finira par arriver. Un jour.

Mais trop tard. Comme toujours !

Foster Laffont

* Conseil communal de la Ville de Bruxelles – Séance du lundi 28 juin 2021 à 16 heures

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