En matière d’énergie, le MR tirera-t-il des leçons de son surprenant succès avec le nucléaire ? C’est peu probable, car comme les autres partis, de peur d’être pénalisé par ceux qui croient encore aux utopies vertes, il entend rester indifférent à ce qui se passe dans le monde.
Cela peut paraître loin, mais il est bon de se rafraîchir la mémoire. Lors de la négociation de l’accord de gouvernement Vivaldi, grâce à la détermination du député David Clarinval, actuellement vice-premier ministre, une clause de rendez-vous a été incluse sur la fermeture des centrales nucléaires. Avant la fin de l’année 2022, il fallait examiner si la Belgique avait les moyens d’assurer la sécurité de l’approvisionnement en électricité en cas de fermeture des centrales en 2023, comme le prévoyait la loi votée en 2003 par le tandem « libéral » écolo Verhofstadt-Deleuze.
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Nucléaire ou renouvelables ? Débat non tranché
La combativité d’une autre MR, l’ancienne ministre de l’énergie Marie-Christine Marghem, a convaincu le président du MR qu’on ne pouvait pas se passer du nucléaire. Il faut aussi se remémorer la ferme opposition du président du parti socialiste, Paul Magnette, qui a catégoriquement exclu cette possibilité. Comme le ridicule ne dérange personne en politique, les Verts de tous les partis ont dû avaler leur chapeau et accepter la prolongation de certaines centrales nucléaires. La rationalité revient toujours. À la COP28 aussi, puisque la conclusion prévoit que chaque pays pourra utiliser tous les combustibles fossiles qu’il souhaite.
Il y a quelques jours, Tinne Van der Straeten a osé vanter le développement des énergies renouvelables sur LinkedIn, allant jusqu’à affirmer que « c’est déjà la source d’énergie la moins chère et la seule dont le prix va continuer à baisser ». Je lui ai demandé pourquoi il fallait une directive européenne pour forcer leur production. La première directive contraignante (que j’ai moi-même gérée à la Commission européenne) a été celle de 2009. Les énergies renouvelables étaient tellement « moins chères » qu’elle a dû être renouvelée en 2018, puis en 2023. Si Tinne Van der Straeten pense vraiment que c’est bon marché, et puisqu’elle présidera le Conseil européen de l’énergie pendant ce semestre, pourquoi ne demande-t-elle pas l’abrogation d’une directive inutile qui crée beaucoup de paperasserie ?
De même que le mensonge sur la possibilité d’abandonner le nucléaire a été démenti, le mensonge sur les énergies renouvelables devrait l’être aussi, et si possible pendant la campagne électorale qui s’ouvre. Le MR aura-t-il le courage de s’attaquer à un autre tabou comme il l’a fait avec le nucléaire ? Mais il découvrira qu’à Bruxelles-Strasbourg, il y aura beaucoup de nouveaux députés qui ont compris que la politique verte nous mène à la ruine. Maintenant que nous savons qu’il est impossible de se passer des énergies conventionnelles, persévérer dans leur opposition est diabolique, comme le dit l’adage.
Et si la Belgique continue de se bercer d’illusions vertes, les réalités, elles, sont claires. Dans un récent rapport, l’Agence internationale de l’énergie admet que seuls 7 % des projets de production d’hydrogène vert lancés à la suite de la frénésie de l’UE pour cette non-énergie n’ont pas encore été abandonnés. J’attends tranquillement qu’ils soient abandonnés eux aussi. D’ailleurs, où en est le projet de Tinne Van der Straeten d’importer de l’hydrogène vert de Namibie, un pays qui ne produit pas d’électricité ?
L’UE a raté la révolution…
Aux États-Unis, le boom du pétrole et du gaz de schiste s’accélère, les entreprises réalisant le potentiel de croissance de la consommation mondiale de combustibles fossiles, en particulier de gaz naturel liquide. En 2018, Vladimir Poutine avait demandé à son gouvernement de faire de la Russie le premier exportateur mondial de GNL. Il n’y est pas parvenu, mais il poursuivra fermement cet objectif. En attendant, ce sont les États-Unis qui ont pris la première place, dépassant l’Australie et le Qatar. Vous n’avez probablement jamais entendu parler de Southwestern Energy. Mais… Chesapeake (que vous ne connaissez peut-être pas non plus) vient d’annoncer l’acquisition de son concurrent pour 7,4 milliards de dollars. Les grandes manœuvres vont bon train pour que les États-Unis vendent toujours plus d’énergies fossiles.
Depuis la guerre en Ukraine, les exportateurs américains de GNL ont signé 57 accords de fourniture représentant environ 73 millions de tonnes par an, soit plus de quatre fois le nombre de contrats qu’ils ont signés entre 2020 et 2021. Les promoteurs de terminaux d’exportation ont profité de cette dynamique pour faire avancer leurs projets de construction de nouvelles installations de liquéfaction pour exporter encore plus de GNL.
Joe Biden est d’ailleurs en difficulté, car il doit concilier la croissance extraordinaire des exportations d’hydrocarbures avec la volonté de ses principaux électeurs, qui estiment que les énergies fossiles doivent être abandonnées. Donald Trump a déjà fait savoir que, s’il était élu, il augmenterait les licences d’exportation dès le premier jour.
Pendant ce temps, en Belgique, nous continuerons à débattre du sexe des anges verts. Quel parti politique aura le courage de dénoncer la fin de la récréation verte ? Y aura-t-il un nouveau Clarinval, Marghem ou Bouchez ? Ou bien les « écologistes de tous bords » continueront-ils à jouer les prestidigitateurs verts ?