Des eurodéputés qui sont approchés par des lobbyistes pour les influencer sur leur prise de position à l’UE, ce n’est un secret pour personne. C’est même le principe dans le quartier européen. Mais, lorsque c’est la Commission européenne (CE) qui distribue des fonds pour promouvoir ses objectifs politiques au travers de ces groupes d’influence, il y a comme un parfum de scandale.
Lobbying antinucléaire
C’est De Telegraaf qui publie la bombe. Dans la bulle bruxelloise, la Commission serait impliquée dans un « système de lobbying nébuleux ». Le programme LIFE - un fond doté de 5,4 milliards d’euros pour 2021-2027 - est l’instrument de financement de l’UE pour l’action environnementale et climatique. La CE aurait utilisé un montant d’un milliard d’euros provenant de ce fond budgétaire pour inciter des ONG environnementales à faire pression sur le Parlement européen en faveur de son programme idéologique. « Ces ONG se sont vu assigner des objectifs pour obtenir des résultats spécifiques auprès des eurodéputés et des Etats membres, notamment dans le but de promouvoir le Green Deal », rapporte le média néerlandophone.
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Nature Restoration Law et agribashing
Créé en 1974, le Bureau européen de l’environnement (BEE) est la plus grande concentration d’ONG vertes en Europe. L’entité faîtière chapeaute aujourd’hui 180 organisations situées dans 38 pays, incluant les États membres de l’UE, les pays candidats et quelques pays voisins. D’après le contrat polémique qui aurait été conclu et dont le contenu a été révélé par De Telegraaf, c’est dans le cadre de ce leadership écologique que la fédération aurait été explicitement chargée par la Commission de fournir au Parlement européen au moins 16 exemples concrets de la manière dont ses efforts sur le terrain ont rendu la législation verte « plus ambitieuse ». Le Bureau aurait également été chargé de promouvoir la loi controversée sur la restauration de la nature portée par l’ancien commissaire européen Frans Timmermans. Lors de son mandat à l’UE, le leader du GL-PvdA aurait reçu, dans le cadre de ce lobby fantôme, des subventions, notamment au travers de Milieudefensie et Natuurmonumenten, membres du BEE. 700.000 euros de subventions auraient aussi été versés pour influencer à Strasbourg les débats sur l’agriculture afin de durcir la législation verte du Parlement.
Une pratique institutionnalisée ?
A la suite de ces révélations, la question du financement par l’UE d’entités faisant pression sur les institutions de l’Union a été abordée en séance plénière du Parlement européen ce 20 janvier. Utiliser l’argent des contribuables pour influencer les députés européens par une porte dérobée était à l’ordre du jour des débats et les députés néerlandais de centre-droit du VVD, du NSC et du BBB sont montés au créneau. Dirk Gotink (NSC), entre autres, a fustigé « une collusion hautement orchestrée entre une coalition verte dirigée par Timmermans et une majorité de gauche au Parlement européen ». Pomme pourrie isolée ou pratique institutionnalisée, il se demande aussi si la Commission européenne n’a pas versé des « pots de vin » pour manipuler les débats dans d’autres dossiers, tel que celui de l’immigration par exemple.
Les Pays-Bas font de la résistance
Nos voisins néerlandais sont en ébullition. L’ancien député européen Derk Jan Eppink a commenté le scandale par voie de presse : « La stratégie du programme des verts fonctionne de manière simple : subventionner, infiltrer et manipuler, avec les ONG comme troupes de choc ! ». Quant à Geert Wilders, il a instantanément réagi sur X : « Groene promotie. Fout, fout, fout, Timmermans ! ». L’intéressé est rapidement sorti du bois. Il conteste, sans se mouiller - on n’en est pas étonné - l’enquête menée par De Telegraaf. « Lorsque j’étais commissaire, il n’y a eu aucun accord secret en faveur du Green Deal en échange de subventions. Mais il appartient à la Commission de répondre ». (Ben voyons !). C’est sans compter sur la détermination de Dirk Gotink. Il n’en démord pas. Membre de la Commission du contrôle budgétaire, il a entrepris d’examiner avec ses collègues les contrats de subvention de la Commission qui ont été passés au cours de ces cinq dernières années. Si leur enquête corrobore les dires de De Telegraaf, ils entendent prochainement demander des comptes à von der Leyen.
Interrogé sur le sujet, le nouveau commissaire européen chargé du budget, de la lutte contre la fraude et de l’administration publique, Piotr Serafin, a certes exprimé « ses inquiétudes » concernant de telles pratiques dont il reconnaît officiellement l’existence, même si du bout des lèvres. (Re ben voyons !) : « Malheureusement, de telles pratiques ont eu lieu dans le passé et doivent être éradiquées. Mais des mesures ont déjà été prises pour remédier à ce problème et je peux assurer à tout le monde qu’elles ne se reproduiront plus ». Donc, c’était vrai pour hier, plus aujourd’hui (sic !). On va donc creuser pour hier et pour aujourd’hui !
Je te tiens, tu me tiens par la barbichette
Selon les chiffres publiés sur le site integritywatch.eu par Transparency International durant le premier mandat de von der Leyen à la tête de la Commission européenne, les organisations non gouvernementales ont sensiblement gagné en influence, alors que les entreprises ont fortement perdu la leur. Entre 2019 et 2024, il y a eu 2.747 réunions entre l’exécutif européen et les ONG, soit 200 de plus que sous la présidence Juncker, un bon de 8%. En revanche, le pourcentage des réunions avec les entreprises individuelles a diminué de 28% (1.600 réunions en moins) et celui avec les associations d’entreprises a baissé de 31% (1.500 réunions en moins), plombant plusieurs secteurs, dont celui de l’automobile. Mais, n’y voyez surtout pas là une éventuelle corrélation avec des pratiques scandaleuses d’influence exercées par Zenzursula et ses sbires !
Dans une démocratie saine, les contre-pouvoirs jouent un rôle crucial pour garantir l’équilibre des forces en présence et prévenir les abus de pouvoir. Or, les lobbyistes et leurs amis de l’exécutif prémâchent en coulisses, depuis des années, le travail du Parlement européen en ignorant la quasi-totalité de l’opinion publique. Si des missions de lobbying auprès des députés européens sont confiées à des structures « caisses de résonance » qui ne plaisent qu’à la Commission européenne, alors l’UE a définitivement un sérieux problème de représentation. Le système est en outre pervers : contrarier la Commission européenne fait perdre de l’argent : fini les subsides si tu ne files pas droit, enfin à gauche. Et pourtant, un silence radio écrasant anime la presse traditionnelle, majoritairement de gauche, il est vrai !