Dans un rapport préparatoire dont le Financial Times s’est procuré la copie et qui sera diffusé la semaine prochaine, la Commission européenne estime que pour atteindre l’objectif de réduire de 90% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040, l’Europe devra investir 1500 milliards par an à partir de 2031.

1500 milliards par an. C’est équivalent à 10% du PIB européen. Par an ! Hors l’effort de guerre, il n’existe aucun objectif d’aucune sorte qui ait jamais commandé le détournement de 10% du PIB d’un continent, par décret politique.

La nouvelle utopie allemande

Ce qui nous montre que, si l’Allemagne a dû baisser pavillon dans le dossier nucléaire (cfr. notre article il y a deux semaines), elle est bien décidée à surenchérir pour le surplus, c’est-à-dire dans l’imposition de l’utopie écologiste sur l’Europe.

Vous me direz : la Commission européenne, ce n’est pas l’Allemagne. Certes, mais toute personne qui a travaillé au sein de la Commission vous le confirmera : il existe à ce niveau deux lobbys dont l’accord est insurmontable : celui de l’Allemagne, de loin la première puissance européenne, et celui des ONG écologistes telles Greenpeace, Friends of the Earth, qui ont des bureaux permanents au sein du Berlaymont. Le fait que l’actuelle présidente de la Commission, von der Leyen, soit allemande, n’est que la cerise sur l’apfelstrudel.

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Pourtant, dans ce rapport délirant de la Commission allemande, tout est faux.

Les calculs pseudo-savants de la Commission

Le rapport affirme que le coût de l’inaction serait bien plus élevé. En effet, explique le rapport, conformément à l’Accord de Paris (2015), le plan européen permettra d’économiser jusqu’à 2400 milliards de dommages liés aux événements climatiques extrêmes. Notons que ce chiffre démentiel va à l’encontre de toutes les projections du GIEC, et qu’il reste au demeurant fort inférieur à 1500 milliards par an pendant dix ans = 15.000 milliards.

Surtout, l’Accord de Paris dont se revendique ici la Commission ambitionnait de limiter le réchauffement mondial à 1.5° à l’horizon 2100. Atteindre cet objectif supposait une réduction drastique et mondiale des émissions humaines de gaz à effet de serre. Or, depuis 2015, ces émissions mondiales n’ont cessé de croître et il n’existe aucun scénario réaliste dans lequel ces émissions mondiales vont décroître. 

Car, le climat est bien entendu une affaire mondiale et si l’Europe réduit à néant ses émissions, tandis que le reste du monde continue de les accroître, l’effet sur le climat sera nul. Par conséquent, le plan allemand ne permettra pas d’économiser un seul centime en termes de dommages liés au réchauffement et aux événements extrêmes (dont le lien au réchauffement reste par ailleurs fort contesté).

Ce n’est donc pas 1500 milliards investis (par an !) pour économiser 2400 milliards. C’est 1500 milliards investis pour économiser 0. Il n’existe plus aucun analyste sérieux qui soutiennent encore que l’objectif de l’Accord de Paris sera atteint ; l’Accord de Paris est caduc et s’en revendiquer, comme le fait la Commission allemande, est irrationnel et mensonger.

En outre, poursuit le rapport, la réduction des importations européennes d’énergies fossiles permettrait des économies pouvant aller jusqu’à 2800 milliards d’euros entre 2031 et 2050. Ce calcul est dénué de fondement scientifique. À l’heure actuelle, il n’existe aucun horizon technique ni scientifique qui permette de dépasser le caractère intermittent des énergies renouvelables (vent, soleil). Par conséquent, le mix énergétique européen devra persister à faire droit, en plus du nucléaire, aux énergies fossiles, comme le montre fort bien le cas de l’Allemagne championne du lignite et des émissions de CO2 — dix fois plus que la France, par unité d’énergie produite — en 2024. Par ailleurs, ce calcul pseudo-savant suppose de connaître par avance les prix du pétrole ; et de persister à interdire l’exploitation des gaz de roche-mère qui se gisent dans le sol européen, etc. Bref, du vent.

Ce rapport de la Commission allemande témoigne d’une affolante fuite en avant. En effet, la situation de l’Europe est déjà dramatique. Depuis 2008, le PIB américain a doublé, ie les Américains gagnent deux fois plus qu’en 2008. Depuis 2008, le PIB européen a stagné, ie les Européens sont toujours davantage taxés, brimés, interdits, tandis que leurs revenus ne progressent pas. Concrètement, des pans entiers de nos populations sont entrés dans un schéma qui est le rêve ultime des écologistes : la décroissance. C’est-à-dire leur appauvrissement.

Scénarios

Trois scénarios se dégagent.

☑ Dans le premier scénario, l’UE persistera dans l’utopie écologiste allemande, ce qui ne manquera pas de jeter l’ensemble de l’Europe dans cette récession où croupit déjà l’Allemagne. Les révoltes populaires iront se multipliant, en comparaison desquelles l’actuelle révolte des agriculteurs passera pour un zakouski. Il devrait être évident que nos démocraties ne résisteront pas, dans la durée, à l’appauvrissement sciemment organisé par des ‘élites’ devenues folles et ivres d’idéologie.

☑ Dans le deuxième scénario, L’UE reviendrait à davantage de raison, sans toutefois défaire le European Green Deal, dont l’entrée en vigueur serait simplement rééchelonnée dans le temps (partiellement différée). Ce scénario condamne l’Europe à une stagnation permanente, sur le modèle du Japon, donc une régression constante sur le reste du monde.

☑ Un troisième scénario verrait une nouvelle majorité prendre le pouvoir à la faveur des élections européennes de juin — après tout, quel est l’objet des élections démocratiques, si ce n’est permettre un changement de cap ? — et déconstruire (abroger) chacune des législations d’un European Green Deal devenu sans objet dans le contexte mondial actuel.

Car, et c’est l’ironie ultime, si l’on en croit les projections du GIEC, le réchauffement aura bien lieu, et nous devrons nous y adapter. Tout ce que l’Europe brûle de ressources dans une fantasmatique ‘transition énergétique’ qui a échoué et échouera, sera autant d’argent qui nous manquera pour nous adapter. Que pourra l’Europe, quand des idéologues malades auront définitivement cassé le dos de son économie ?