Le changement climatique modifie-t-il l’intelligence des ingénieurs ? Ou change-t-il la clairvoyance des hommes politiques ? La principale raison de l’échec des promesses inconsidérées faites depuis le Pacte Vert est que les militants de ce rêve pensaient que les ingénieurs étaient des idiots et que soudain, grâce à la volonté politique, tout ce qui n’était pas possible avant l’est désormais. Surtout depuis qu’Ursula von der Leyen a ouvert son portefeuille et distribue généreusement aux profiteurs l’argent que nous n’avons pas. C’est typiquement le cas des biocarburants.
Le bio, une vieille histoire
Dès l’adoption de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Rio 1992), on a commencé à parler des carburants synthétiques. À l’époque, on parlait beaucoup de la concurrence que cette production entraînerait sur les prix des céréales. Pour faire bonne figure auprès des agriculteurs, George Bush (fils) a lancé un programme de subventions pour produire du bioéthanol à partir du maïs, programme qui est toujours en vigueur aux USA et qui se maintient grâce aux subventions. À l’époque, il y a eu une révolte au Mexique, la révolte des tortillas, à cause de l’augmentation du prix du maïs dans le pays. Les subventions sont un mal absolu dans une prétendue économie de marché, car d’une part, elles entraînent des conséquences négatives - parfois lointaines - et d’autre part, elles engendrent la corruption.
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Malgré cette mauvaise expérience, l’UE en 2009 a obligé de consommer 10 %
de biocarburants pour le secteur des transports. Ce fut une aberration qui a favorisé les producteurs asiatiques qui ont défriché pour produire ce combustible. À tel point qu’en 2015 la directive a été légèrement modifiée, remplaçant le minimum de 10 % par un maximum de 7 % de biocarburants conventionnels. En 2018 eut lieu une nouvelle révision de l’enthousiasme qui s’était avéré excessif sans bénéfice environnemental. Les biocarburants et le biogaz produits à partir de déchets/résidus non alimentaires devraient contribuer à hauteur de 0,2 % au minimum en 2022, de 1 % en 2025 et de 3,5 % en 2030. Plus important encore, les biocarburants, bioliquides et carburants issus de la biomasse utilisés dans le secteur des transports et produits à partir de cultures vivrières humaines et animales ne peuvent contribuer qu’à hauteur d’un point de pourcentage de plus que la consommation de ces mêmes carburants en 2020, avec un seuil maximum de 7 %. Les États membres déjà bien avancés dans la production de biocarburants pourront donc produire un point de pourcentage supplémentaire, tout en restant en dessous du seuil de 7 %. Le message était on ne peut plus clair : il n’y a plus de minimum pour les carburants produits à partir de produits alimentaires.
Soudainement, on devient intelligemment vert
Puis l’intelligence est arrivée au pouvoir dans l’UE et nous sommes retombés dans l’illusion qu’avec les subventions, nous allions voir ce que nous allions voir. Le Pacte Vert promettait tout. Et les profiteurs se sont lancés avec enthousiasme dans la nouvelle course aux biocarburants, comme ils l’ont fait aussi pour l’hydrogène. Les profiteurs ne sont pas des imbéciles, ce sont des lâches. Ils ont peur des écologistes qui, grâce à leur connivence avec les médias, ont réussi à envouter les industriels, pourtant très puissants dans le monde. Les grands groupes pétroliers européens, BP, Shell, TotalEnergies, etc., se sont lancés dans cette course comme s’ils ignoraient les échecs de la décennie précédente.
Mais la vérité économique et physique finit toujours par s’imposer. Shell a annoncé la semaine dernière qu’elle interrompait la construction de son usine de biocarburants à Rotterdam « en raison de la faiblesse des conditions du marché ». Ce projet, d’une capacité de 820 000 tonnes par an, devait être construit dans le parc énergétique et chimique de Shell à Rotterdam. Le mois dernier, BP a annoncé qu’il réduisait ses projets de nouveaux carburants aéronautiques durables (SAF) et de biocarburants diesel renouvelables sur ses sites existants. La société a suspendu la planification de deux projets potentiels tout en continuant à évaluer trois autres projets. BP a confirmé que ses usines HEFA SAF de Lingen, en Allemagne, et de Cherry Point, aux États-Unis, ont été mises en veilleuse. L’avenir de trois autres installations SAF de BP à Kwinana, en Australie, à Castellon, en Espagne, et à Rotterdam, aux Pays-Bas, reste incertain.
Il est facile de dire que l’on veut devenir une entreprise verte en annonçant des objectifs aussi extravagants que ceux de l’UE. Certaines promettent même d’atteindre une intensité carbone nette nulle pour les produits énergétiques qu’elles vendent d’ici à 2050, voire avant ; et les naïfs y croient.
Mais bien sûr, pour jeter de l’argent par la fenêtre afin de plaire aux activistes, il faut d’abord le gagner. C’est pourquoi les compagnies pétrolières continuent d’investir dans le pétrole et le gaz, comme jamais auparavant. Elles savent, elles sont convaincues, que ce n’est pas demain que nous réduirons la consommation de ce qui fait tourner le monde. Le monde a toujours désespérément besoin de pétrole et de gaz. En 2023, la production mondiale de pétrole a atteint un niveau record d’un peu plus de 96 millions de barils par jour. Les combustibles fossiles continuent de représenter 84 % de la consommation totale d’énergie primaire dans le monde. La transition énergétique n’existe tout simplement pas dans le monde.
Les fonds de pension, principaux actionnaires des compagnies pétrolières, sont tenus d’avoir des revenus suffisants. Ils exigent donc un retour sur investissement conséquent. Le PDG de BP, Murray Auchincloss, a déclaré que « nous sommes vraiment, vraiment motivés par le rendement, et tout sera axé sur le rendement et le flux de trésorerie ». Après des années d’investissements dans l’éolien, le solaire, les biocarburants, l’hydrogène et la capture du carbone, la réalité met fin à l’utopie, à moins que ce ne soit l’hypocrisie.
Les médias belges subventionnés continuent de faire croire que les énergies renouvelables remplaceront le pétrole et le gaz. Un investisseur qui se soucie de l’avenir du monde, de la prospérité essentielle de tous les citoyens du monde et de la rentabilité de son portefeuille investira dans les combustibles fossiles et évitera le marché artificiel des énergies renouvelables.