Sénat et Assemblée convergeant vers la cohésion nationale ?
Deux présidents proches du Chef de l’État, c’est un cas de figure que l’on retrouve en d’autres démocraties. A fortiori en situation de guerre, l’on peut se réjouir de tout ce qui permettra d’encourager la cohésion du pays. Les deux présidents parlementaires sont de l’Est : Jean-Michel Sama Lukonde est katangais, au Sénat, et Vital Kamerhe est kivutien, à l’Assemblée nationale.
Outre le budget 2025 qui figure d’ores et déjà au registre des priorités, il est dès à présent annoncé que cette session sera axée sur le conflit à l’Est. Plus clairement, Jacques Djoli, le rapporteur de l’Assemblée nationale, a déclaré que l’accent allait être mis sur les questions sécuritaires. Les deux Chambres en ordre de combat ? Le patriotisme y prendra-t-il enfin le pas sur l’affairisme et les trafics d’influence ?
L’ancien premier ministre a ainsi été recyclé en une fonction législative. Face à lui, le candidat UDPS au perchoir du Sénat avait compris le message, et l’a même déclaré : « Je ne pouvais que m’effacer en faveur de celui à qui notre haute autorité a jeté son dévolu ». Un boulevard offert à Jean-Michel Sama Lukonde qui promet : « Mon action dans la gestion de notre chambre repose sur un plan visant à mettre en place un Sénat efficace, moderne et accessible. Le Sénat devra jouer son rôle d’élaboration, d’analyse et d’adoption des textes des lois. Il devra exercer en toute indépendance le contrôle sur le gouvernement, les institutions d’appui à la démocratie, les entreprises publiques, les établissements publics et services publics. ». La définition de l’activité parlementaire idéale sortie tout droit d’un ouvrage théorique de pédagogie civique. Au Congo, c’est lunaire ! Pas uniquement là, d’ailleurs : les arcanes parlementaires wallonno-belges laissent aussi songeur à cet égard !
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Jean-Michel Sama Lukonde est un personnage discret. Même Premier ministre, il a systématiquement veillé à ne pas faire d’ombre au Président Tshisékédi. Et il agissait déjà de la sorte lorsqu’il se situait sous le Président Kabila qu’il a quitté ensuite. Néanmoins, au dernier scrutin, il a mené un parti qui s’est hissé assez haut pour damer le pion à Modeste Bahati qui paraissait pourtant indéboulonnable. Ce dernier a ainsi été relégué à la fonction de deuxième vice-président du Sénat. Phénomène analogue à l’Assemblée nationale où Christophe Mboso, son président, au cours du mandat précédent, se retrouve lui aussi deuxième vice-président sous Vital Kamerhe.
La promesse de Vital Kamerhe est sans doute celle qui interpelle le plus : « réhabiliter le député national congolais ». Promettre de réhabiliter, c’est avouer publiquement qu’il y a matière à assainir le milieu. La corruption est notoire et colossale. Combien de députés (et de sénateurs) faudra-t-il envoyer à la célèbre prison de Makala pour que cette promesse prenne un sens concret ?
Vital Kamerhe s’affirme volontariste : « C’est pour ça que nous sommes dans cet hémicycle. C’est d’abord pour le peuple. Nous allons aussi faire en sorte que les députés nationaux travaillent dans de bonnes conditions. Pour cela, nous allons ensemble avec les collègues respecter le minimum d’éthique pour un représentant du peuple ». Soulignons le terme « minimum », n’exagérons pas en espérance, et voyons-y un bon début. À l’Est, ce serait une belle avancée car l’un des principaux éléments de la guerre est le détournement de fonds affectés à la défense nationale. De la haute trahison caractérisée ! Le moratoire relatif à la peine de mort ayant été levé, combien d’exécutions ?
Les évocations théoriques, les postures de principe et le triomphalisme par anticipation, c’est monnaie courante. Ce stade a été rarement dépassé en soixante-quatre ans d’indépendance. Le jour où l’on passera à l’acte au pays, avec rigueur et constance, la croissance sera fulgurante. Oui, le jour-où…