La vénérable usine Audi se trouve donc en mort cérébrale. Désolant mais pas étonnant. Il est loin le temps où ce joyau de l’industrie bruxelloise produisait plus d’un million de VW Coccinelle et plus encore de Passat mais surtout près de quatre millions de Golf !

Même s’il reste un centre de production sur le territoire national, Volvo à Gand, la Belgique est devenue un cimetière de l’industrie automobile. 

Sans remonter à la nuit des temps, Renault a fermé son usine de Vilvorde en 1997 (3.100 pertes d’emploi), Volkswagen à Bruxelles en 2007 (5.300), General Motors à Anvers en 2010 (2.300) et Ford à Genk en 2014 (4.300). Chaque fois, ce fut un bain de sang social sans compter celui des milliers de sous-traitants et de l’usine d’autobus Van Hool à Lierre (2.500) que la timide arrivée d’Audi à Forest n’a compensé que très timidement.

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Cette disparition d’un des secteurs industriels les plus performants du pays était-elle inéluctable ?

Absolument pas et l’une des raisons majeures de cette situation est la fédéralisation de la Belgique.

Le serpent qui se mord la queue

Un exemple significatif ? Toyota, le premier constructeur mondial décidait de créer des usines en Europe. C’était à la fin des années 80, après la deuxième réforme de l’État. Les patrons japonais ont cherché l’endroit le plus propice pour leur implantation. Et le premier pays auquel ils ont pensé fut la Belgique où se trouve le siège de Toyota Motors Europe. Ils se sont donc renseignés auprès de patron de Toyota Belgique qui les a introduits auprès du Premier ministre Wilfried Martens et de Jean Luc Dehaene, alors ministre des Affaires sociales et des réformes institutionnelles qui leur expliquèrent que cette matière était devenue une compétence régionale et qu’il fallait donc s’adresser aux gouvernements des entités fédérées… Ce qu’ils firent consciencieusement !

Les huiles du gouvernement flamand présidé par Gaston Geens, sûres que l’implantation Toyota en Belgique était acquise, ont surtout expliqué pourquoi il ne fallait pas aller en Wallonie, et celles du gouvernement wallon, présidé par Jean-Maurice Dehousse, ont tenu exactement le même raisonnement… en sens inverse !

Résultat des courses : les Nippons se sont demandé dans quel foutoir ils étaient tombés et ont construit une première usine à Burnaston, en Angleterre puis une autre en France à Onnain, à… cinq kilomètres de la frontière belge ! 

Petit détail pour nos brillants stratèges : plus de 5.000 personnes travaillent à Burnaston et, à Onnaing, la Yaris est la voiture la plus fabriquée en France, davantage que toutes les marques françaises !

La Belgique, petit pays, n’a pas les moyens de pression de ses voisins pour conserver ses bijoux de famille. Alors, que dire des régions !

Pas un cas isolé…

Tiens, curieux : il n’y a pas que dans le monde automobile que les centres de décision ont quitté la Belgique. Depuis la première (1970) et surtout la deuxième réforme de l’Etat, la Société Générale de Belgique est devenue française (Suez) tout comme la PetroFina (Total), Electrabel-Tractebel (Suez), Générale de Banque (BNP Paris-Bas), GB (Carrefour), Materne (Andros) ou la Royale Belge (AXA). BBL est devenue hollandaise (ING) comme Delhaize (Ahold) ou Maes (Heineken). La Brugeoise & Nivelles est devenue canadienne (Bombardier), Côte d’Or suisse (Suchard), RaffinerieTirlemontoise allemande (Sudsucker), Clabecq italien (Duferco), sans parler de la Sabena (Swissair) qui s’est terminée de la dramatique façon que l’on sait. Etc.

Mais tout ceci est certainement un hasard…

Ch.H.