La RTBF a donc « investigué » du côté des avocats bruxellois en mission au Maroc. Sa cible : l’ancien bâtonnier Pierre Legros, Sophie Michez, André Martin Karongozi et Emmanuel Carlier. Un cinquième avocat est occulté. Le club des cinq ? A voir.
Les robins se sont donc rendus en 2017 au procès devant la cour d’appel de Salé de 23 séparatistes saharaouis pour l’assassinat de 11 policiers, assassinés froidement lors de l’investissement d’un camp au Sahara.
Le représentant du bâtonnier de Bruxelles, Me Geoffroy Cruysmans, a été sollicité par la RTBF. Pour insister sur le fait qu’il n’avait pas connaissance que ces avocats aient été chargés d’une mission d’observation à la demande de son barreau. Réagissant ainsi, la réponse aurait pu être un peu plus neutre mais on peut comprendre l’inquiétude d’une instance face à la pression journalistique. Et on le verra : inquisitrice. Pierre Legros reconnaît que c’est le Maroc qui l’en a chargé et qu’il ne s’en est jamais caché. La RTBF ajoute perfidement qu’il ne trouve pas trace qu’il l’ait dit à l’époque. Emmanuel Carlier s’exprime volontiers, sur les commodités : « on était contents d’être là. On était logé dans un bel hôtel, les restaurants étaient payés ». Il ne sait plus qui l’a payé, « symboliquement » selon son souvenir mais « on ne dit pas ses honoraires ». Plus étonnant pour ce robin, alors que Me Legros ne paraît pas remettre en cause sa propre indépendance d’esprit : « il n’y avait aucune indépendance, ni dans un camp, ni dans l’autre » …. Allant beaucoup plus loin que la reconnaissance des avantages en nature : « mais oui, on peut dire qu’on a servi les intérêts du Maroc ».
Karongozi, un avocat particulièrement respecté en son barreau d’adoption, n’a pas la même vision : « le fait d’avoir été payé par le Maroc n’a pas influencé mes observations. Aucune autorité marocaine n’a dicté ma ligne de conduite. C’est Pierre Legros qui m’a proposé de participer à cette mission ».
La RTBF semble s’en prendre ensuite à Sophie Michez, pour avoir déclaré lors d’une conférence de presse en 2022 : « je suis avocate pénaliste et j’ai acquis une certaine expérience en ce qui concerne le Sahara Occidental dans la mesure où j’ai participé en tant qu’observatrice au procès « Gdim Izik » qui s’est déroulé de 2017 à 2018 et j’ai eu l’occasion par après d’intervenir auprès des Nations-Unies afin de dénoncer justement le détournement des aides humanitaires qui ont eu lieu au sein des camps de Tindouf ». La RTBF pointe le fait que l’avocate ne serait jamais allée au Sahara occidental ou à Tindouf, ce qu’elle n’a apparemment jamais déclaré. Et qui ne semble pas indispensable pour acquérir une « certaine expérience » sur le sujet géo-juridique. Le retrait de la robine mutique, sans doute derrière son secret professionnel, montre une RTBF cherchant le scoop et d’humeur revancharde lorsque la belle se refuse à elle.
La RTBF est pernicieuse mais il y a aussi le maréchal Legros en cette histoire ; cohérent et qui reste un poids lourd que l’on ne peut envisager voir démonté. Cruysmans déjà sorti de sa réserve (le premier bureau de droite au sortir des ascenseurs au 1er étage du grand palais) revient vite à la rescousse : « Pas d’obstacle à ce qu’un Etat mandate un avocat pour suivre un procès ». Ouf, le bout de gras des avocats est préservé. « Pas interdit non plus à l’avocat d’exprimer dans les médias le point de vue de son client ». Un bavard, ça peut causer tout le temps et partout. « Et si le client le demande, ma foi, l’avocat peut même taire son identité dans les médias ». Pas de quoi faire un foin et pas question de priver le barreau du lobbying public. Tout le monde n’est pas d’accord ? Questions de déontologie…