De la fiction pulp à la réalité trumpienne - le film sorti en 1994 s’inspire directement des pulps, ces magazines populaires des années 1930-50 qui mélangeaient allègrement les genres - l’odyssée des malfrats de l’info, en mode chasse aux sorcières, atteint son paroxysme à quelques encablures des élections américaines. 

Stacey Williams, une ex-mannequin présentée à Donald Trump par Jeffrey Epstein, accuse l’ancien président de l’avoir agressée sexuellement en 1993. L’incident aurait eu lieu à la Trump Tower, à New York, et selon S. Williams, il faisait partie d’un « jeu pervers » entre les deux hommes, révèle. Trump
 « mettait ses mains partout sur mes seins, ainsi que sur ma taille et mes fesses »,
révèle The Guardian. Quel curieux timing ! 31 ans après les soi-disant faits. Ces allégations ont été détaillées par Williams lors d’un entretien organisé par « Survivors for Kamala », un groupe soutenant la candidate démocrate. Vous avez dit bizarre ? En revanche, ces mêmes médias de gauche, qui tente le buzz sur la dernière ligne droite, n’ont jamais publié la liste des près de 200 noms liés à l’affaire Epstein, dont un certain Bill Clinton.

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Comme les nazis en 39 ?

Deux jours plus tard, c’est Le Soir qui en remet une couche avec un titre populiste comme seul un média de gauche sait en faire : « Présidentielle américaine : Trump au Madison Square Garden, comme les nazis en 39 ? ». Quel est le lien ? Un rassemblement nazi, organisé dans ce lieu, le 29 février 1939, par le Bund germano-américain. Quel biais ! Ou comment faire d’un événement ponctuel une référence. Et quelle inculture ! Le Madison Square Garden est LA salle mythique de New-York, celle de tous les concerts, celle où Marilyn Monroe chanta son « happy birthday » au président John Fitzgerald Kennedy et celle qui a accueilli, ces dernières décennies, indifféremment des conventions républicaines, comme des conventions démocrates. 

Un Godwin médiatico-politique

Le point Godwin est atteint. Quelle est cette théorie ? : « Plus une discussion en ligne se prolonge, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de un » (Mike Godwin, 1990). Le principe consiste à associer son contradicteur à Hitler, aux nazis ou à toute autre idéologie honnie de l’Histoire pour disqualifier le reste de son argumentaire. Une stratégie qui n’est pas nouvelle. En 1953 déjà, le politologue allemand Léo Strauss avait mentionné le reductio ad Hitlerium (réduction à Hitler) dans son ouvrage Natural Right and History.

Depuis, le point Godwin s’est étendu à la sphère politique et médiatique. Verbiages à la dérive et excès rhétoriques, tout y passe : accusations, insinuations et autres tentatives, on en fait des tonnes, on exagère, on ressort les vieux dossiers poussiéreux, on joue sur les peurs et on invente même pour influencer certains segments de la population. En résumé : Trump, c’est Hitler, Mussolini et Staline réunis. Bémol ! Les titres de presse et les effets d’annonce deviennent tellement énormes que même les électeurs les moins férus de politique, lassés des méthodes grossières employées, commencent à hausser les sourcils. 

Que nous dit le point Godwin de notre société ? Dans un brouillage volontairement entretenu entre réalité et fiction, les médias traditionnels ont perdu depuis longtemps la bonne distance. Malheureusement, lorsque les faits deviennent secondaires par rapport au récit qui en est fait, il faut plus qu’une campagne de diabolisation pour faire basculer des élections aussi cruciales. A quelques jours du vote du 5 novembre, que les sondages annoncent très serré, Trump insiste sur l’économie,  l’immigration et la sécurité et Harris sur le changement climatique, la liberté de procréation et son soutien aux communautés LGBTQI +.Sans vouloir hiérarchiser les priorités de chacun, le contexte géopolitique mondiale devrait donner le « La » dans les urnes.