Dans une carte blanche publiée dans La Libre, Maud de Ridder (Ecolo), échevine de l’Enseignement à Forest, s’inquiète de la vision du MR et des Engagés pour l’enseignement officiel. « Le sort qu’ils réservent à l’école publique ressemble à un saccage organisé », affirme-t-elle. Au-delà du fait que certains médias semblent décidément étrangement attentifs aux avis des perdants lors des récentes élections - à savoir ces mauvais élèves qui ont mis l’enseignement francophone dans l’état de délabrement actuel - le saccage de l’école est aussi financier. Mais là, les langues se délient beaucoup moins ! Et pourtant, cela bug depuis fort longtemps !

Le système éducatif belge est un des plus inégalitaires et sélectifs d’Europe, il se partage entre les écoles élitistes et les « autres ». Plus qu’ailleurs, les résultats scolaires dépendent du milieu d’origine, fustige Mau de Ridder. Petite piqûre de rappel ! Pour réduire les inégalités scolaires, la Fédération Wallonie-Bruxelles investit chaque année plusieurs dizaines de millions d’euros (98,6 millions en 2022-2023) dans les écoles à indice socio-économique dit faible. Les écoles à « encadrement différencié », reçoivent des fonds supplémentaires, notamment pour recruter du personnel enseignant ou acheter du matériel. Depuis 1989, le budget alloué à cette politique est passé de 1,8 à près de 100 millions d’euros. Il profite à un quart de la population scolaire. Enfin, il devrait profiter à… 

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Et pourtant, il y a de sérieux trous dans certaines caisses scolaires et cela n’a pas l’air de déranger ni Ecolo ni le PS. Petit flash-back utile. En novembre 2012, une enquête confirme des détournements de fonds à la Haute école Albert Jacquard : 25.000 euros qui devaient servir à acheter du matériel informatique et Horeca se sont volatilisés. Le directeur de l’école est visé. Février 2015, détournement de fonds cette fois à l’Athénée Royal d’Evere. Le préfet aurait effectué des travaux pour plusieurs milliers d’euros chez lui aux frais de l’école, sans compter l’utilisation de la camionnette de l’école à des fins privées ! Janvier 2020 :  l’économe d’une école de la province de Namur est accusé d’avoir détourné plus de 50.000 euros sur 5 ans : tablettes, smartphones, argent en liquide et émissions de fausses factures, c’est la totale ! En juin 2024, c’est à Vedrin que cela se passe, l’ex-président du Pouvoir Organisateur aurait initié des mouvements frauduleux sur les comptes de l’école professionnelle spécialisée La Sitrée. Il est suspecté d’escroquerie pour un montant total d’un million d’euros. Dernier braquage en date : en juillet 2024, dans un courrier adressé au parquet de Bruxelles, à l’administration Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE), à la Cour des Comptes et aux Ministres Frédéric Daerden (PS) et Pierre-Yves Jeholet (MR), un proche du dossier pointe des dépenses suspectes de l’ancien préfet de l’Athénée Crommelynck à Woluwe-Saint-Pierre, qui vient de quitter l’établissement pour rejoindre sa nouvelle affectation à la rentrée (sic !) : 210.000 euros seraient partis en fumée pour la location d’imprimantes et de photocopieuses, sans mise en concurrence comme le prévoit la loi sur les marchés publics. Vous lisez bien : la location, pas l’achat ! Apparemment bien informé, l’auteur du courrier compare ce montant avec le budget raisonnable de 27.000 euros consacré par une école équivalente à la location de matériel. 

Pour quel contrôle des dépenses ?

Mauvaise gestion des budgets alloués aux écoles, fraudes aux subventions ou encore abus dans l’utilisation des ressources destinées à l’éducation, les dérivés sont légion. Si les établissements scolaires disposent d’une large autonomie dans l’utilisation de fonds publics, on peut légitimement se demander quel contrôle est exercé sur les dépenses ? Sous l’égide de Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE), son site internet nous informe que la cellule de contrôle financier chargée de réaliser les audits est coordonnée par Mihigo TUNGA GANZA, assisté de 3 contrôleurs : Sophie ATEBA MANGUI, Dieudonné MABAKOU et Floriane NIJIMBERE. Quatre personnes donc. Actuellement, l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles compte 2.685 écoles, dans lesquelles 120.000 enseignants et enseignantes accompagnent 900.000 élèves. Faut se lever tôt pour passer tout cela au crible. Autre chose. Le contrôle est-il annuel ? Est-il systématique, soit pour tous les établissements, ou aléatoire ? Sur base d’une plainte uniquement ? Nous avons contacté WBE pour obtenir des réponses, sans succès ! En revanche, un enseignant nous répond sous couvert d’anonymat : « En gros, le comptable fait un peu ce qu’il veut avec le préfet, en termes de gestion. Et quand la coupe est pleine, souvent, c’est un membre du corps enseignant qui n’a pas reçu son matériel qui balance un courrier anonyme à qui de droit ». Que dire de plus ? C’est déjà l’heure de la rentrée scolaire… mais à quel prix ?