La semaine dernière a été surréaliste pour l’énergie nucléaire.
En quelques jours, partisans et opposants se sont affrontés, mais sans jamais se parler.
Une fois de plus, la Belgique est un pays divisé, probablement le plus divisé de l’Union européenne en ce qui concerne l’énergie nucléaire.

Pas besoin de nucléaire, acte 1

La semaine a commencé par l’annonce d’une étude montrant que l’on peut se passer de l’énergie nucléaire. Écolo et Groen l’ont commandée au groupe flamand EnergyVille pour prévoir le mix énergétique en 2050, afin d’atteindre l’objectif de décarbonisation. Un seul des scénarios étudiés permet de se passer du nucléaire, et c’est bien sûr celui proposé par les écologistes.

Concernant les transports, ils recommandent de doubler l’utilisation des modes de transport « doux », tels que la marche et le vélo (on pourrait y ajouter les ânes), et de réduire l’utilisation de la voiture pour le transport des personnes (de 71 % à 55 %). Pour les marchandises, ils optent pour le transport par voie d’eau. Imaginons qu’Amazon livre ses colis par barges à une vitesse de 15 km/h, ils ne seront pas livrés le lendemain, mais dans un mois. Comme nous devrons tous vivre avec le même biorythme, le covoiturage sera bientôt obligatoire. Il faudra s’habituer à vivre dans des maisons plus petites de 16 % (pourquoi pas 15 % ?). Il faudra réduire la consommation de ciment de 39 %, de céramique de 33 % (ils ont vraiment pensé à tout !), de produits chimiques de 18 %, d’acier de 10 %, d’ammoniac de 15 % et de produits non métalliques de 11 %. Bref, pour sortir du nucléaire, il faut changer de société et entrer en sobriété.

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Ces mesures recourent presque toutes à des flammes plutôt qu’à l’électricité. Or le nucléaire ne produit pas de flammes. Réduire la production de ciment ou d’acier ou organiser le transport de marchandises par péniche aura un impact sur la consommation de combustibles fossiles, pas sur celle d’électricité.

Jean-Marc Nollet, adulé par les médias subventionnés, a présenté son scénario sans contradiction, ce qui lui permet de persister à dire que le nucléaire est l’énergie du passé. Il a raison, car c’est elle qui a permis à l’UE de se développer avec une énergie abondante et bon marché. Mais c’est aussi celle de l’avenir. Des projets innovants voient le jour là où les écologistes n’ont pas occupé le devant de la scène médiatique (Chine, Russie, Corée, États-Unis). Les nouveaux réacteurs seront intrinsèquement sûrs et élimineront le combustible usé, que M. Nollet persiste à appeler « déchet ».

À noter qu’EnergyVille, qui a fait l’étude, a refusé de signer le communiqué de presse, contrairement à l’habitude.

On a besoin du nucléaire 

Le surlendemain, l’initiative citoyenne 100 TWh, qui prône un développement durable de l’énergie non seulement « vert », mais aussi bénéfique pour notre économie et notre population — et donc en faveur du nucléaire — a organisé une rencontre a laquelle ont été conviés des représentants des partis politiques francophones et flamands. Chaque parti a exprimé sa vision de la politique énergétique qui, comme on peut l’imaginer, est assez divergente. Mais contrairement à Groen, Écolo n’avait pas l’intention d’y participer et surtout la presse a refusé de venir assister à un débat proposé par cette association essentiellement composée d’ingénieurs sans lien avec l’industrie ou les lobbies. Il est regrettable que nos médias subventionnés ignorent délibérément les voix dissonantes des associations qui tentent de relayer de manière structurée des avis impartiaux.

Le lendemain, un sommet mondial sur l’énergie nucléaire a eu lieu sur le plateau du Heysel, avec l’Atomium en arrière-plan, à la demande de la présidence belge de l’UE. Le Premier ministre Alexander De Croo en était l’hôte. Il convient toutefois de noter qu’il a eu recours à un subterfuge. Il a fait en sorte que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) soit l’organisateur officiel. L’« Agence de Vienne » est surtout connue pour son contrôle de la non-prolifération atomique, comme le contrôle de la nucléarisation de la République islamique d’Iran. Je n’avais jamais vu cette agence s’intéresser à la promotion de l’énergie nucléaire. Pourtant, ses statuts prévoient un tel rôle (« L’Agence s’efforce d’accélérer et de renforcer la contribution de l’énergie atomique à la paix, à la santé et à la prospérité dans le monde »). Nous devons nous réjouir que ce rôle ait été repris. Merci aux écologistes belges qui poussent l’AIEA à remplir son rôle de promotion de l’énergie atomique (n’ayons pas peur d’utiliser le nom original prévu par le traité Euratom)… pour la prospérité.

Les 37 chefs d’Etat ou de délégations mondiales et industriels présents ont réaffirmé que l’énergie nucléaire devait faire partie du mix énergétique. Le Premier ministre a indiqué qu’il pensait — mais il a précisé « à titre personnel » — que l’énergie nucléaire devait être relancée. En revanche, il n’a toujours pas pris position sur l’abandon ou même la modification de la loi de 2003 sur la sortie du nucléaire imposée par les écologistes. Hypocrisie ou peur ?

Pas besoin de nucléaire, acte 2

La Belgique est bien le pays du surréalisme. Pendant que le chef du gouvernement annonçait sa conversion au nucléaire, à quelques mètres de là, sa ministre de l’énergie, Tinne Van der Straeten, intervenait dans une conférence pour affirmer le contraire, accompagnée de Greenpeace et de sa clique d’activistes. Bien sûr, Nollet était là pour réitérer sa thèse que nous pouvons atteindre 100 % d’énergie renouvelable d’ici 2050. Je rappelle que les énergies vantées par les écologistes, l’éolien et le solaire, ne représentent que 3 % de l’énergie primaire en Europe et dans le monde. Prétendre que nous atteindrons 100 % relève de la malhonnêteté intellectuelle.

Si les écologistes ne sont pas sanctionnés lors des prochaines élections, rien ne changera en matière de politique énergétique. Avec les autres partis de gauche, ils pourront encore nuire à l’avenir du pays en bloquant le développement du bien-être et de la prospérité, car tel est leur objectif. En Flandre, par contre, les écologistes ne seraient plus indispensables à la majorité, et l’on peut donc s’attendre à des changements. Rappelons que la ministre flamande de l’Énergie, Zuhal Demir, a déjà proposé de régionaliser la politique nucléaire fédérale. À mon avis, cela deviendra inévitable. Alors que le nucléaire se développe fortement dans le monde, la Wallonie, avec son mythe vert, va paralyser la croissance économique de ce qui fut au siècle dernier le cœur du monde industriel.